La comparution immédiate en France : entre rapidité et justice équitable

La comparution immédiate est une procédure judiciaire française qui permet de juger très rapidement une personne après sa garde à vue. Si elle vise la rapidité et l’efficacité, elle soulève de nombreuses questions sur le droit à une défense équitable et contribue à la surpopulation carcérale. Majoritairement utilisée contre des personnes précaires et récidivistes, elle devient une pratique courante plutôt qu’exceptionnelle. Dans cet article, j’explique ses enjeux, ses limites et pourquoi il est essentiel de repenser cette justice expéditive.

Ava Magassa

9/7/20253 min read

⚖️ Une justice qui va vite… parfois trop vite ?

Depuis que je suis avocate, je vois combien la justice française cherche à concilier rapidité et efficacité. Mais derrière cette volonté, une procédure intrigue, inquiète et interroge : la comparution immédiate. On la surnomme souvent la “justice expéditive”. Pourtant, elle touche chaque année des milliers de personnes et change le cours de vies entières. Alors, comment fonctionne-t-elle vraiment, quels en sont les risques, et pourquoi alimente-t-elle autant de débats ?

Qu’est-ce que la comparution immédiate ?

La comparution immédiate permet de juger une personne, en général dans la foulée de sa garde à vue, lorsque les faits semblent clairs et sérieux. Elle vise des infractions graves : vols avec violence, trafic de stupéfiants, violences, etc.
👉 Concrètement, après 24 à 48 heures de garde à vue, le procureur peut décider d’un renvoi immédiat devant le tribunal correctionnel. L’affaire est jugée dans les 48 heures, parfois même le jour même.

Pourquoi a-t-on créé cette procédure ?

À l’origine, l’idée était simple : apporter une réponse pénale rapide, éviter les détentions provisoires trop longues et désengorger les tribunaux. Sur le papier, cela semble pertinent : moins d’attente, moins d’engorgement, plus d’exemplarité. Mais dans la pratique, la précipitation peut fragiliser la justice.

Une procédure en pleine expansion

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : entre 2001 et 2024, les comparutions immédiates sont passées de 31 200 à plus de 60 000 chaque année. Rien qu’en 2021, 58 222 personnes ont été jugées ainsi, soit près de 10 % de toutes les poursuites. Ce qui devait être l’exception est devenu la règle.

Défense limitée : un temps trop court pour se préparer

Le principal écueil de cette procédure est le manque de préparation. Après une garde à vue éprouvante, il est presque impossible pour un justiciable d’organiser correctement sa défense. Les audiences durent en moyenne 30 minutes, et malgré l’accès garanti à un avocat, le temps de travail reste très limité.

Une machine à incarcérer ?

La conséquence est lourde : entre 70 et 77 % des prévenus jugés en comparution immédiate repartent directement en prison. Ce taux d’incarcération est huit fois plus élevé qu’en audience classique. Avec plus de 84 000 détenus pour 62 000 places en 2025, cette procédure contribue largement à la surpopulation carcérale.

Qui sont les personnes jugées ?

La sociologie des comparutions immédiates est sans appel : des jeunes hommes précaires, souvent en récidive, sans emploi ou logement stable. Cette justice rapide frappe en priorité les plus fragiles de notre société.

Une exception française en Europe

La France est quasiment la seule en Europe à recourir aussi massivement à cette procédure. La Belgique a même abandonné la comparution immédiate après l’avoir jugée inconstitutionnelle. Chez nos voisins, la justice préfère privilégier l’équilibre entre rapidité et équité.

Réformes récentes : des avancées timides

La loi du 20 novembre 2023 a amélioré certains points : meilleur accès au dossier, suppression de certains délais… Mais le problème principal demeure : le temps de préparation reste dérisoire et les dossiers complexes continuent à être jugés dans l’urgence.

Mon regard d’avocate : concilier rapidité et dignité

Je comprends l’exigence d’une justice réactive, surtout dans un contexte où la sécurité est au cœur des préoccupations. Mais aller trop vite, c’est prendre le risque de sacrifier la vérité et l’équité.
👉 Pour moi, la comparution immédiate devrait être réservée aux cas les plus simples, avec un véritable renforcement des droits de la défense. Une justice humaine a besoin de temps pour écouter, comprendre et juger.

Conclusion : informons-nous, agissons ensemble

La comparution immédiate n’est pas une mauvaise idée en soi, mais mal encadrée, elle devient une justice d’abattage. Le débat doit rester ouvert, car il en va de l’équilibre entre sécurité et respect des droits fondamentaux.

💬 Merci d’avoir pris le temps de me lire. Si vous ou l’un de vos proches êtes concernés par une comparution immédiate, ne restez pas seuls. Contactez-moi pour être accompagné et défendu. Ensemble, nous pouvons faire valoir vos droits.

👉 Prenez rendez-vous dès maintenant